Distanciation sociale : quel avenir pour les commerces ?
Depuis cinq semaines, le centre-ville de Montréal est désert. Si les artères commerciales de la métropole souffrent déjà de la baisse de fréquentation des commerces et des travaux qui rendent l’accès aux boutiques moins agréable, le confinement pourrait encourager les consommateurs à adopter de nouvelles habitudes à l’échelle locale.
Par l’entremise de ses filiales et de ses partenaires, Ivanhoé Cambridge détient une participation dans plus de 1000 immeubles à vocation commerciale et industrielle.
Marie Grégoire s’entretient avec Nathalie Palladitcheff , présidente et cheffe de la direction de cette entreprise qui fait fructifier le portefeuille immobilier de la Caisse de dépôt et placement du Québec pour sonder son intuition.
Comment penser l’évolution du centre-ville dans les prochains mois ?
C’est difficile de se projeter dans le contexte actuel. On réfléchit de plus en plus à la façon dont on peut accompagner la tendance, avec, par exemple, des espaces dédiés ou labellisés qui permettraient aux gens de se retrouver, à la fois dans le sens de se réunir, mais aussi de se trouver. Aucun modèle d’investissement immobilier à long terme ne porte toutes les réponses. Mais comme nous sommes un acteur global à long terme, on peut aussi voir ce qui se fait comme modèle et le répliquer ailleurs. On va sans doute entrer dans une phase de protectionnisme, ou de réduction des échanges commerciaux, mais ça ne nous interdit pas de rester attentif à ce qui se passe dans le reste du monde.
“ Notre mission est d’anticiper ce qui va être durable, et donc profitable. Car ce qui n’est pas durable, par définition, ne peut être profitable que dans un temps restreint.”
La mondialisation semble se trouver face à des limites «naturelles» qui vont avoir des conséquences sur le commerce international. Comment interpréter le nouvel engouement pour l’achat local ?
Ivanhoé Cambridge est un investisseur global et un acteur local. L’immobilier, c’est s’insérer dans un tissu communautaire, être plus connecté avec des producteurs locaux, des besoins locaux, et une demande qui est en phase avec ces phénomènes. Nous avons déjà intégré cette perspective dans notre planification. Comment peut-on faire fructifier le capital des Québécois dans une direction qui a du sens à long terme? C’est la question que l’on doit se poser. Notre mission est d’anticiper ce qui va être durable, et donc profitable. Car ce qui n’est pas durable, par définition, ne peut être profitable que dans un temps restreint. Si on est en phase avec des attentes fondamentales, cette mission d’investissement va fonctionner.
Quel sera, selon vous, l’avenir des espaces commerciaux dans un horizon de cinq ans ?
J’aimerais avoir la réponse. C’est important de savoir que ce sera autre chose. Il y a beaucoup de webinaires et de conférences en ligne, mais personne n’a la réponse. À part des choses évidentes qu’on entend, sur la permanence du besoin de se retrouver, de se divertir. On voit déjà ces composantes avec Time Out et le Cathcart. Cela correspond à des envies, des attentes. On voit qu’on est au cœur de cette attente mais ce n’est pas la fin de la métamorphose du centre-ville. Certains de nos interlocuteurs dans les centres commerciaux vont disparaître. Il faut avoir l’ouverture d’esprit de se dire que ces espaces commerciaux ne seront plus les mêmes. On semble être en avance parce qu’on se pose déjà ces questions. Et se poser la question, c’est déjà prendre une avance.