Marie Pier Germain voit l'avenir au présent
Mardi 20 octobre 2020
En période de pandémie, Germain Hôtels innove en proposant des chambres propices au télétravail et un studio aménagé pour des conférences virtuelles. Voici l’état des lieux avec Marie Pier Germain, récente finaliste aux prix Mercuriades dans la catégorie Relève, Femme d’exception.
Annie Bourque
Avec la zone rouge et la limitation des déplacements décrétée par le gouvernement, quel est l’état de la situation dans vos établissements?
Cet été, nos hôtels de Montréal et de Toronto ont vécu un achalandage anémique avec des taux d’occupation variant de 5 à 20 %. Dans les autres hôtels du Canada, la situation est moins dramatique, mais reste inquiétante. À Baie-Saint-Paul, dans Charlevoix, nous avons eu un été exceptionnel. Avec l’instauration des zones rouges – moi, j’appelle ça le reconfinement – on retombe au même point qu’au printemps. Hier, j’avais seulement 3 chambres de louées et certains soirs, je n’en ai aucune.
« Nous avons géré en minimisant les pertes alors qu’avant, on gérait pour maximiser les revenus. Un virage à 180 degrés. »
- Marie Pier Germain
Quels sont les pronostics pour le groupe?
Au lendemain du confinement, le 15 mars, nous avons perdu du jour au lendemain 95 % de nos revenus alors qu’on anticipait une de nos meilleures années. Nous avons décidé de rester ouverts, ce qui nous permet de conserver 300 employés en poste grâce aux subventions salariales.
Auparavant, on embauchait 1500 personnes. Parmi les mises à pied, on compte malheureusement de nombreuses femmes qui sont retournées chez elles. Entretemps, on n’a pas eu d’autre choix que de restructurer rapidement l’entreprise. Nous avons géré en minimisant les pertes alors qu’avant, on gérait pour maximiser les revenus. Un virage à 180 degrés. Notre équipe s’est retroussé les manches. L’un de nos directeurs d’hôtel, par exemple, a dû cumuler plusieurs tâches et n’a pas hésité à se charger de la réception.
Ce qui nous fait le plus mal, c’est de devoir payer les frais fixes comme les taxes, l’électricité ou les assurances. Nos frais d’électricité s’élèvent à 10 000 $ par mois. C’est énorme. Comment voulez-vous qu’on paie un tel montant alors que nous accueillons très peu de clients? En ce moment, on vit grâce à notre marge de crédit. Un congé de taxes de la Ville de Montréal serait tout indiqué. L’évaluation foncière est basée sur nos revenus des trois dernières années, ce qui ne correspond pas à la réalité actuelle.
« Cet été, avec le mouvement d’achat local, on a vraiment senti la sympathie des Québécois qui ont voulu nous encourager. Ça donne espoir. Le défi que je me lance, c’est de ramener au travail les employés qu’on a dû laisser partir. » - Marie Pier Germain
Le groupe a pris plusieurs virages pour faire face à la baisse de fréquentation. Comment voyez-vous l’avenir?
On pense aux entrepreneurs ou aux gens qui veulent sortir de chez eux. Nous avons aménagé un studio pour des réunions en mode hybride ou virtuel. C’est un environnement plus attrayant qu’une bibliothèque brune en arrière-plan.
On a aussi des décors design et neutres. Un dirigeant d’entreprise peut donc utiliser le studio pour une entrevue ou des présentations en équipe de travail.
Cet été, avec le mouvement d’achat local, on a vraiment senti la sympathie des Québécois qui ont voulu nous encourager. Ça donne espoir.
Quand je regarde les derniers mois, le mot relève prend tout son sens. Le défi que je me lance, c’est de ramener au travail les employés qu’on a dû laisser partir. Ce sont des gens que j’ai connus quand j’étais toute petite.
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