Pour le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, une masse critique d’abord

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ESTHER LAPOINTE
Directrice Générale, GFPD


NATHALIE LAVOIE
Politologue, GFPD

L’élection historique d’une première ministre au Québec en 2012 a été suivie de celle tout aussi emblématique en 2017 d’une première mairesse à Montréal ainsi que dans d’autres municipalités du Québec. Ce qui risque de passer également à l’histoire, c’est le nombre record 1 de candidatures féminines dans le cadre du scrutin général québécois en cours.

De réels efforts des partis politiques

En vue du prochain scrutin général québécois, les chef.fe.s 2 des partis politiques ont fait de réels efforts afin de présenter des candidatures féminines dans la zone paritaire 40/60. Au moment d’écrire ce texte, on y retrouvait Québec solidaire (54%), la CAQ (49 %) et le PLQ (42 %). Le PQ en était à 37%. C’est dire que lorsque les partis politiques font l’effort de trouver des candidates, ils en trouvent!

Mais encore, les femmes se retrouvent-elles dans des circonscriptions dites prenables? Selon les projections de J. Philippe Fournier de Qc125.com datées du 28 juin 2018, 117 des 125 circonscriptions ont 60% et plus de probabilité d’être gagnées par un parti. De ce nombre, 104 (89%) étaient investies ou en voie de l’être.

Québec solidaire présente 50% de femmes dans ses quatre circonscriptions dites prenables 3. Le PLQ fait aussi bonne figure en ayant placé 50% de femmes dans leurs circonscriptions gagnantes. La CAQ suit avec 37% de ses candidates et le PQ est dernier avec 33% de candidates. À ce stade-ci, et si on se base sur la même projection, la moyenne d’élues à l’Assemblée nationale pourrait se situer autour de 41 % puisqu’on compte déjà 43 candidates dans les 117 circonscriptions dites prenables.

 
 

Les bonnes intentions intermittentes ne suffisent pas 

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Actuellement, les femmes ne sont que 29,6% à l’Assemblée nationale. Depuis 2012, le Québec a glissé du 22e au 48e rang mondial concernant la représentation des femmes parlementaires, selon le palmarès de l’Union interparlementaire. Le Canada est au 60e rang 4.

D’autres exemples, ailleurs dans le monde, font ressortir que la seule volonté politique ne suffit pas pour atteindre, de façon durable, la parité au sein des parlements nationaux. La Belgique, la France et le Costa Rica en sont des exemples éloquents : le premier, par l’adoption de quotas 5en 1994 (Loi Smet-Tobback), est passé de 19% de femmes parlementaires à 25% en 1999, et subséquemment, avec un renforcement de la loi en 2002, à 38% d’élues en 2007 et 41% en 2014 ; la France, avec l’adoption de quotas aux élections législatives en 2000, est passée de 26% d’élues au Parlement à 39% en 2017 ; quant au Costa Rica, on parle de 15,8% en 1997 à 45,6% en 2018 après l’adoption de quotas légaux en 1998. Outre l’imposition de quotas, d’autres variables peuvent entrer en ligne de compte, tel le mode de scrutin en présence 6.

Le 24 avril dernier, le Groupe Femmes, Politique et Démocratie remettait aux cheffes des partis politiques un projet de loi en faveur de la parité et un manifeste en expliquant la nécessité, une action soutenue par des Partenaires pour la parité. L’adoption d’une loi en faveur de la parité ne réglera pas tout du jour au lendemain. Il s’agit d’un moyen législatif pour assurer à long terme une juste représentation de la moitié de la population du Québec.

En cette période électorale où les cheffes des partis politiques formulent leurs engagements pour les prochaines années, nous les exhortons 7 à s’engager maintenant à modifier la Loi électorale pour favoriser durablement la représentation paritaire des femmes et des hommes à l’Assemblée nationale.

1. En 2014, à la date limite de dépôt des candidatures, les données du DGEQ indiquaient que les femmes ont représenté 29,6% (241) de l’ensemble des candidatures, soit une légère augmentation par rapport au scrutin québécois de septembre 2012 (28,5%). Cepourcentage était de 31% aux scrutins de 2007 et de 2008. Le pourcentage de candidates (2014) selon l’affiliation partisane a été le suivant: CAQ : 22,4 % ; Option nationale : 25,0%; Parti libéral du Québec : 28,0 %; Parti Québécois : 37,1% ; et Québec solidaire : 50,4% –
Source : Résultats électoraux provinciaux 2014
Parité femmes/hommes: un recul important, communiqué, GFPD, 14 avril 2014.

2. À Québec solidaire, le principe de parité (50%) des candidatures a été respecté dans le cadre des quatre derniers scrutins généraux québécois.

3. Compilation spéciale, GFPD, 28 juin 2018 à partir des sites Web de chaque parti politique (y incluant les député.e.s sortant.e.s, sauf celles et ceux ayant annoncé ne pas se représenter) et les données de Qc 125.com, prévisions du 28 juin 2018 de Philippe J. Fournier, L’actualité.

4. Source : Site Web, Union interparlementaire, 1er juin 2018.

5. Loi tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives adoptée le 3 mai 2000.

6. Les pays qui ont adopté des quotas atteindraient la parité entre 18 et 22 ans, et ce, selon le mode de scrutin en présence. Sans politique de quotas, il en prendrait le double du temps pour atteindre la « zone paritaire » au sein de ces pays, soit 35 ans pour les systèmes proportionnels et plus de 70 ans plus les modes de scrutin de type non proportionnel (source : IPU (accessed July 2008); ACE Electoral Knowledge Network (accessed July 2008) ; IDEA (2005) ans, IDEA (accessed July 2008).

7. Québec solidaire et le Parti québécois appuient le projet de loi en faveur de la parité du GFPD et des Partenaires pour la parité. La CAQ s’engage à obtenir un conseil des ministres paritaire tandis que le PLQ adhère au principe de « zone paritaire » dans les candidatures ainsi qu’au conseil des ministres, et ce, sur une base volontaire.