Édito du 20 mai 2025: être canadienne en 2025
Mise à jour le 20 juin 2025
Rarement nos assises économiques auront-elles été aussi ébranlées que depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump. L’incertitude s’imposera comme la nouvelle norme pour un certain temps.
De l’aveu même du premier ministre Mark Carney, le Canada est à la croisée des chemins. Il faudra lancer d’immenses réformes afin de répondre aux menaces protectionnistes de l’administration Trump et à une compétition mondiale qui s’intensifie.
Emmanuelle Latraverse
Cette fois-ci, pas le choix, notre écosystème économique devra impérativement prendre le virage de la productivité qui lui échappe depuis si longtemps. Dans ce contexte, les femmes, qui luttent depuis des décennies pour s’imposerdans les sphères économiques traditionnellement masculines, se trouvent face à un paradoxe. Le climat d’incertitude pourrait fragiliser ces avancées si chèrement acquises.
Déjà les Canadiennes ont commencé à faire tomber certaines barrières dans les domaines de la finance et de l’entrepreneuriat. Les chiffres demeurent encore loin de la parité : seulement 4 % des PDG des entreprises du TSX 60 sont des femmes, tandis que la représentation féminine dans les conseils d’administration plafonne autour de 30 %. La révolution économique qui s’annonce risque-t-elle de freiner cette progression encore fragile ? La question se pose quand on sait que, tel que l’a établi la Banque de développement du Canada, pour chaque dollar investi dans une entreprise dirigée par un homme, seulement 70 cents vont vers celles dirigées par des femmes, malgré des performances similaires. Or, l’envers de la médaille est tout aussi vrai, cette crise pourrait constituer un accélérateur de changement.
Les périodes de transformation sont souvent celles où les structures rigides se fissurent. Les qualités associées au leadership féminin
– vision à long terme, gestion collaborative, innovation inclusive – sont parfaitement adaptées aux défis contemporains. On en a souvent fait état dans ces pages. Les données économiques confirment que la diversité constitue un avantage compétitif. Les entreprises ayant une plus forte proportion de femmes dans leurs instances affichent généralement une meilleure rentabilité et une plus grande résilience face aux crises. Des leaders comme Julie Gascon, à la tête de l’Administration portuaire de Montréal, seront aux premières loges de cette transformation.
Pour transformer cette crise en opportunité, une volonté politique est nécessaire. Le gouvernement canadien doit mettre en œuvre des politiques pour encourager l’innovation tout en favorisant l’accès des femmes aux postes de décision. Les établissements financiers doivent revoir leurs critères d’évaluation, qui sont souvent involontairement influencés par des préjugés. En définitive, le Canada se trouve à la croisée des chemins. Les défis actuels peuvent être perçus comme des obstacles supplémentaires, mais cette crise constitue aussi une chance unique de rebattre les cartes et de valoriser de nouvelles formes de leadership. Les femmes maîtrisent déjà les outils nécessaires pour surmonter cette crise. Après tout, c’est à coup d’audace, d’innovation et de détermination que les femmes se sont taillé une place de choix dans le monde des affaires au Québec.