Les femmes invisibles ne sont pas une minorité

 

Mise à jour le 20 juin 2025

Il y a quelques semaines, j’ai eu la chance de rencontrer Janette Bertrand. Cette centenaire a accepté une invitation à prendre le thé pour une levée de fonds au profit du Fonds Collectif Femmes Action Montréal de la Fondation du Grand Montréal, qui offre un
soutien financier aux organismes du Grand Montréal œuvrant auprès des femmes et des filles de la ville. Souvent négligés par les grands bailleurs de fonds, les organismes financés par le Fonds recevraient une faible part du financement philanthropique.

Pour ma fille et les générations qui suivent, je souhaite un monde où le terme « minorité visible » ne s’applique pas aux femmes.

Cette rencontre a profondément fait écho à mes réflexions sur l’égalité des genres. Comment est-il possible qu’en 2025 on continue de parler des femmes comme d’une minorité, alors qu’elles représentent près de la moitié de la population mondiale ? Ce terme de « minorité » ne traduit pas une réalité chiffrée, mais révèle de mécanismes subtils de domination sociale profondément ancrés.

En tant qu’entrepreneure et mère de trois enfants – dont une fille –, je vis quotidiennement ces paradoxes. Le Québec a progressé : davantage de femmes occupent des postes de direction, et les universités accueillent une proportion croissante d’étudiantes. On dirait que les mentalités évoluent, pourtant, les inégalités persistent. Une illusion de désordre mondial suffit pour faire vaciller les certitudes les plus évidentes. Simone de Beauvoir était la compagne du philosophe existentialiste Jean- Paul Sartre. Cette phrase lui a été attribuée : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. »

Lors de mon échange avec Janette Bertrand, sa détermination était palpable. Elle qui a tant lutté pour dénoncer les rapports de pouvoir m’a rappelé que chaque génération doit reprendre ce combat. Les institutions québécoises protègent et encouragent l’égalité, mais il reste du travail à faire. Pour ma fille et les générations qui suivent, je souhaite un monde où le terme « minorité visible » ne s’appliquera jamais aux femmes. Un monde où notre présence sur le long cours ne sera plus considérée comme une exception, mais comme une évidence.